i'm breathing in, the chemicals (aiden)

✤ Regrets collect like old friends.

♢ La main dans laquelle je tenais le téléphone se posa doucement sur le drap de mon lit. Mon regard était perdu dans le vide, ma bouche légèrement entrouverte, ma respiration calme. Rien n'aurait pu présager cette tempête qui allait bientôt s'abattre sur moi. Pourtant, la nouvelle, je l'avais déjà eue. C'était impersonnel, mais c'était bien par téléphone, que l'on m'avait annoncé la mort de mon meilleur ami. J'étais qu'un gosse, un ado. Je n'avais jamais connu quelqu'un qui était mort avant. Alors, je ne savais pas comment réagir. Mes yeux étaient secs, et des tremblements vinrent prendre place plus ou moins forts dans mon corps, tout d'un coup. Je me levais brusquement, attrapais ma lampe de chevet et la lançais contre le mur. Dans un fracas, elle éclata et les morceaux tombèrent au sol. Mon corps aussi, se laissa glisser jusqu'à la moquette de ma chambre, et les larmes vinrent trouver mes yeux. Elles tombaient, formant des petits points sur le blanc du sol. Mes mains s’agrippèrent au premier meuble dans mon champ de vision, et je serrais tant l'objet que des petites échardes de bois s'enfoncèrent dans ma paume. Je ne sentais plus la douleur. Toute ma chambre y passa. Je lançais ce que je pouvais briser, avant de me rendre compte que mes parents n'étaient pas riches, et que je ne voulais pas qu'ils se serrent la ceinture pour me racheter tous les meubles. Elias était parti. Il n'était plus sur Terre, et ne croyant pas à la vie après la mort, c'était comme s'il n'avait jamais existé. Il avait vécu, et m'avait laissé. Seul. Il n'avait pas été assassiné. Il n'avait pas eu un accident. Il s'était délibérément donné la mort. Comment pouvais-je comprendre, moi, qui n'était qu'un môme ? Comment pouvait-on en avoir si marre, de la vie, qu'on ne voulait plus essayer du tout ? Surtout quand on avait un entourage qui comptait sur vous et qui vous aimait ? Je n'étais pas le seul à l'adorer. Il y avait sa sœur, et sa meilleure amie. Je n'osais imaginer comment elles avaient appris la nouvelle, comment elles avaient réagi. Et petit à petit, mon cerveau redevint entier, et je nettoyais à fond ma chambre, enlevant tout ce que j'avais cassé et masquant les dégâts. Je ne pouvais plus me laisser aller de cette manière. Il fallait que je sois fort, un roc, pour tous les autres. Sinon, j'étais qu'un putain d'égoïste. Je m'asseyais sur mon lit, hésitant à appeler Arya, ou Emily. Je ne voulais pas les faire aller plus mal qu'elles ne devaient déjà l'être.



♢ Mon portable vibra, et je regardais rapidement qui m'avait envoyé un SMS. C'était Arya, et le seul nom sur mon écran m'apporta un sourire. Depuis la mort d'Elias, elle m'avait été d'un grand soutien, elle et la sœur de mon ami décédé, Emily. J'avais trouvé un certain bonheur dans mon deuil, et aujourd'hui, j'étais encore bien heureux d'avoir ces deux personnes toujours là pour moi. Et j'étais toujours là pour elles évidemment. Même si j'étais un homme pas forcément agréable la plupart du temps, trop sarcastique pour avoir beaucoup d'amis, trop intelligent pour trouver d'intérêt dans la masse. Je me contentais de peu, et c'était assez bien pour moi. Parfois, en plein milieu de la nuit, je me réveillais d'un cauchemar où j'avais vu mon ancien meilleur ami, la peau pourrissant, des vers lui sortant des orbites oculaires. Je n'en pouvais plus, mais je savais que si j'appelais une des deux filles, elle viendrait pour m'aider à m'endormir. Je me sentais comme un bébé incapable, dans ces moments là. Et j'avais honte, honte de m'afficher comme quelqu'un de faible. La plupart du temps, je faisais de mon mieux pour montrer que j'avais tout en contrôle, que rien ne m'affectait. Mais la vie que je menais en ce moment ne me convenait en rien. Mon boulot était ingrat, celui de préparer des boissons toute la journée et de sourire à la clientèle. On me réprimandait souvent pour mon manque de politesse par rapport aux gens que je servais. Et j'essayais de m'améliorer, vraiment, mais ça marchait pas, ça marchait vraiment pas. J'avais envie d'être libre, de faire une profession où je pouvais faire ce que je voulais. Photographe, écrivain .. Quelqu'un qui se servait de ses expériences quotidiennes pour faire de l'art. Au lieu d'écrire, je lisais, au lieu de peindre, je visitais de nombreuses expositions. Trop peureux pour faire moi même, et je me détestais pour ça. Je ne prenais jamais de risques, tournais au coin de la rue après avoir vérifié qu'il n'y avait rien de dangereux. De manière métaphorique, heureusement. Et je n'avais personne à part les filles à qui montrer mon désespoir, pas de foi dans laquelle me cacher. Je savais pertinemment qu'il n'y avait pas de Dieu à qui montrer fidélité, sinon, Elias serait toujours là.